Les concessions se distinguent des marchés publics par le transfert de la responsabilité d'exploitation qu'elles impliquent. La Commission européenne identifie les caractéristiques propres aux concessions de travaux et de services. Elle précise les règles et principes applicables à ce type de contrat en vertu du traité et du droit dérivé ainsi que de la jurisprudence de la Cour de Justice.

Le traité instituant la Communauté européenne ne définit pas les concessions. Seule la directive 93/37/CEE sur les marchés publics de travaux prévoit un régime spécifique aux concessions de travaux. Cependant, les concessions de services, qui se sont développées dans la pratique de plusieurs États membres, sont soumises aux règles et principes du Traité CE.

CHAMP D'APPLICATION

La présente communication vise les concessions par lesquelles une autorité publique confie à un tiers la gestion totale (ou partielle) d'une activité économique qui relève normalement de sa responsabilité et pour laquelle ce tiers assume les risques d'exploitation.

La communication ne concerne:

- les actes par lesquels une autorité publique confère une habilitation ou octroie une autorisation à l'exercice d'une activité.
Exemples: les concessions de taxi ou les autorisations d'utiliser la voie publique (kiosques à journaux, terrasse de café), les actes concernant les pharmacies, les pompes à essence;
- les actes visant des activités à caractère non économique telles que la scolarisation obligatoire ou la sécurité sociale.
Sont concernées en principe les formes de relations entre pouvoirs publics et entreprises publiques chargées de mission d'intérêt économique général. Sont exclues du champ d'application du droit communautaire des concessions, les relations inter-organiques dites "in-house" qui impliquent notamment que le pouvoir adjudicateur exerce sur le concessionnaire un contrôle analogue à celui qu'il exerce sur ses propres services et réalise avec lui l'essentiel de son activité.

La concession de travaux

La directive 93/37/CEE distingue la concession de travaux d'un marché public par l'octroi au concessionnaire du droit d'exploiter l'ouvrage réalisé comme contrepartie de la construction de celui-ci. La présence du risque d'exploitation, lié à l'investissement réalisé, est déterminante. Ce droit d'exploitation peut également être accompagné d'un prix.

Le droit d'exploitation implique le transfert de la responsabilité d'exploitation du concédant vers le concessionnaire. Une telle responsabilité couvre à la fois les aspects techniques, financiers et de gestion de l'ouvrage. Ainsi, le concessionnaire doit effectuer les investissements nécessaires pour que son ouvrage soit mis à la disposition des usagers dans de bonnes conditions. Il prend en charge le poids de l'amortissement et assume les risques liés à la construction, à la gestion et à la fréquentation de l'équipement.

Le droit d'exploitation permet au concessionnaire de percevoir, pendant une période donnée, des droits sur l'usager de l'ouvrage réalisé et/ou d'autres formes de rémunération provenant de l'exploitation. Il peut s'agir par exemple d'un péage, d'une redevance ou d'une rémunération de type « shadow toll ». Le fait que le droit d'exploitation puisse s'accompagner d'un prix ne change rien si ce prix ne couvre qu'une partie du coût de l'ouvrage. Il arrive en effet qu'un État supporte partiellement le coût d'exploitation de la concession afin que le prix à payer diminue pour les usagers. Cette rémunération partielle peut prendre la forme d'une somme forfaitaire ou d'une somme versée en fonction de la fréquentation. Mais cette rémunération partielle ne peut avoir pour effet d'éliminer le risque d'exploitation qui est à la charge du concessionnaire, sous peine de requalification du contrat en marché public.

La concession de services

La directive 92/50/CEE sur les marchés publics de services ne définit pas les concessions de services. La nouvelle directive 2004/18/CE définit les concessions de services comme des contrats présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché public de services, à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation de services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter ce service, soit dans ce droit assorti d'un prix. Mais les concessions de services ne sont soumises à aucune règle détaillée de la directive.

Néanmoins, les concessions de services sont soumises aux règles et principes découlant du Traité CE. Nous sommes en présence d'une concession de services lorsque l'opérateur supporte les risques liés à l'établissement et à l'exploitation du service. Celui-ci se rémunère sur l'usager, notamment par la perception d'une redevance. Comme pour les concessions de travaux, les concessions de services se caractérisent par un transfert de la responsabilité d'exploitation.

Comment définir le régime applicable lorsque l'on est en présence de contrats mixtes qui supposent la réalisation de travaux et la prestation d'un ou plusieurs services? Dans la pratique, c'est d'ailleurs presque toujours le cas puisque le concessionnaire de travaux rend souvent un service à l'usager sur la base de l'ouvrage qu'il a réalisé. Si l'objet principal du contrat porte sur la construction d'un ouvrage pour le compte du concédant, il s'agit d'une concession de travaux. C'est le cas par exemple pour une autoroute ou un pont à péage. Si le contrat comporte plusieurs objets dissociables, il convient d'appliquer à chacun les règles qui lui sont spécifiques. Par exemple, les services de restauration d'une autoroute peuvent faire l'objet d'une concession de service différente de la concession de construction ou de gestion de l'autoroute.

DISPOSITIONS COMMUNAUTAIRES APPLICABLES AUX CONCESSIONS

Le traité instituant la Communauté européenne interdit toute discrimination en raison de la nationalité et établit des règles relatives à la libre circulation des marchandises, à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services. Les concessions de travaux ou de services sont soumises en particulier aux articles 28 à 30 et 43 à 55 qui reposent sur les principes suivants:

- l'égalité de traitement.
Ce principe implique notamment que les règles du jeu doivent être connues de tous les concessionnaires potentiels et doivent s'appliquer à tous de manière uniforme.
La Cour a précisé que, pour permettre une comparaison objective des offres, celles-ci doivent toutes être conformes aux prescriptions du cahier des charges. Et, si un pouvoir adjudicateur prend en compte une modification d'une seule offre après l'ouverture des plis, la Cour estime que le soumissionnaire concerné est avantagé.
Sont contraires à l'égalité de traitement des dispositions qui réservent des contrats publics aux entreprises dans lesquelles l'État ou le secteur public détient une participation majoritaire ou totale;
- la transparence.
Le principe de transparence peut être assuré par tout moyen approprié, y compris la publicité, qui contient les informations nécessaires pour permettre aux concessionnaires potentiels de décider s'ils sont intéressés.
Dans la quasi-totalité des États membres, des règles ou des pratiques administratives prévoient que le pouvoir adjudicateur rende public son intention de lancer une concession.
Dans son arrêt Telaustria, la Cour de Justice de l'Union européenne rappelle l'obligation pour le pouvoir adjudicateur de garantir un degré de publicité adéquat en faveur de tout soumissionnaire potentiel dans le cadre de l'attribution de concessions ;
- la proportionnalité.
Selon le principe de proportionnalité, toute mesure choisie doit être à la fois nécessaire et appropriée au regard du but recherché.
En matière de concessions, un État membre ne peut exiger des capacités techniques, professionnelles ou financières disproportionnées et excessives lors de la sélection des candidats. La durée de la concession ne doit pas non plus restreindre ou limiter la libre concurrence au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer l'amortissement des investissements et une rémunération raisonnable des capitaux investis, tout en maintenant un risque inhérent à l'exploitation pour le concessionnaire.
- la reconnaissance mutuelle.
Selon le principe de la reconnaissance mutuelle, un État membre est tenu d'accepter les produits et services fournis par des opérateurs économiques d'un autre État membre. Il doit accepter également les spécifications techniques, les contrôles, les titres, les certificats et qualifications exigés dans un autre État membre dès lors que ces éléments sont reconnus équivalents.
Le traité prévoit quelques exceptions aux principes de liberté d'établissement et de libre prestation de services. Pour les concessions, ces exceptions se limitent aux cas visés par l'article 45 du Traité comme celui dans lequel le concessionnaire participe directement et spécifiquement à l'exercice de l'autorité publique. En tant que telles, les activités dites de "service public" ou exercées en vertu d'une obligation ou d'une exclusivité établies par la loi ne sont donc pas automatiquement couvertes par cette exception.

Motiver les décisions de refus

Lors d'une concession, le pouvoir adjudicateur doit motiver le refus ou le rejet d'une offre pour permettre au soumissionnaire s'estimant lésé de lancer une procédure de recours.

La directive 89/665/CE sur les voies recours pour les marchés publics s'applique aux concessions de travaux.

La directive 93/37/CEE "travaux" établit des règles de publicité spécifiques

En amont, tout pouvoir adjudicateur doit publier un avis de concession de travaux publics au Journal officiel de l'Union européenne en vue de mettre ce contrat en concurrence au niveau européen. Cette règle de publicité est valable quelle que soit la nature du concessionnaire potentiel.

En aval, se pose le problème des marchés passés par le titulaire du contrat de concession. Tout dépend de la nature juridique du concessionnaire:

- si le concessionnaire est lui-même un pouvoir adjudicateur, les contrats de travaux supérieurs au seuil communautaire doivent respecter toutes les dispositions détaillées de la directive relative aux marchés publics de travaux;
- si le concessionnaire n'est pas lui-même un pouvoir adjudicateur, la directive impose uniquement certaines règles de publicité.
Ces règles ne sont pas applicables si les contrats de travaux sont passés avec des entreprises groupées ou liées.

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